Saint
Hilaire de Poitiers
évêque de Poitiers
et défenseur de la Foi,
(315 - 368)
Fêté le 13 janvier
ORIGINE ET CONVERSION
Fils d'un sénateur patricien poitevin, HILAIRE, surnommé
par saint JEROME, le "Rhône de l'éloquence latine
et la trompette des Latins face aux Ariens" est un des plus grands
théologiens du haut Moyen-Age. Il est aussi un des premiers écrivains
de l'Eglise occidentale. Il naquit à Poitiers en 315, dans une
famille gauloise non chrétienne. D'après Hilaire lui-même
les familles patriciennes étaient soucieuses de culture et de
bien-être. Leur idéal était bien souvent "d'être
riche et de ne rien faire ".
Nous savons très peu de choses sur lui
avant que Dieu le prenne en main. Mais il cultiva certainement sa vive
intelligence en étudiant la rhétorique et la philosophie
et développa sa sensibilité au contact des beautés
de la nature. Il devint un orateur, se maria et eu une fille appelée
Abra (Abram, Afra, ou Apra) \ Mais cela ne pouvait suffire à
son bonheur, son but étant la recherche de la Vérité.
Un soir en lisant la Bible il fut frappé par le Témoignage
que Dieu y rend de Lui-même dans l'exode : "Je suis celui
qui est".
Conquis par cette définition parfaite, ce fut pour lui un tournant
dans sa recherche, une véritable conversion. La transcendance
de Dieu qu'il commençait à connaître augmentait
jour après jour. C'est en lisant le prologue de l'Evangile de
saint Jean qu'il trouva le Vrai Visage du Seigneur et il comprit que
le Verbe descendu des cieux donnait, en s'incarnant, à chaque
homme, le pouvoir de devenir enfant de Dieu. Et il écrit cette
merveilleuse phrase, véritable profession de Foi : "Mon
âme accueillit dans la joie la révélation de ce
divin mystère. Car par la chair je m'approchais de Dieu, et par
la foi j'étais appelé à une nouvelle naissance.
Il était en mon pouvoir d'obtenir la régénération
d'en haut".
Il dut se faire inscrire parmi les catéchumènes,
reçut le baptême vers 350 et continua en apparence, à
mener la même vie, tout en méditant l'Evangile. A partir
de ce moment, il mena une vie totalement consacrée à Dieu,
ne pensant plus qu'à exhorter les hommes à devenir des
Saints. Sa femme et sa fille la future sainte ABRA se convertirent à
la même époque.
L'EGLISE DE POITIERS
L'évangélisation du Poitou, terre qui accueillera Hilaire
comme Evêque est peu connue et reste obscure par manque de documents.
Les étapes en auraient été : au premier siècle
la mission de saint Martial, disciple de l'apôtre Pierre. C'est
vers 290 que les Pictons reçurent leur autonomie religieuse avec
Nectarius leur premier évêque. D'autres témoignages
existent ; tels que la présence de martyrs, avec le sacrifice
de Simplicien ; D'autre part des rangs de l'Eglise Pictave serait sorti
Maximin de Trêves qui a accueilli Athanase d'Alexandrie grand
défenseur de l'orthodoxie nicéenne, lors de son exil,
à Trêves.1
HILAIRE DEVIENT ÉVÊQUE
Vers 351-352, l'évêque Paixent de l'Eglise de Poitiers
meurt. Hilaire qui jouissait d'un grand prestige car on le savait remarquable
théologien fut choisi par acclamations comme successeur. Il accepta
dans un esprit de service ses nouvelles responsabilités. Et il
appliquera dans sa vie ses propres paroles : "L'évêque
est placé à la tête de la maison pour veiller aux
besoins et aux intérêts du peuple qui lui est confié"
et "L'évêque ne remplit son ministère que s'il
fortifie ce qui est faible par un enseignement à la fois authentique
et adapté, s'il consolide ce qui tombe en ruine, s'il redresse
celui qui s'égare, s'il dispense le verbe de vie à la
famille qu'il a à nourrir de la nourriture éternelle".
Il fut un évêque aimé se consacrant en premier lieu
à la prédication et à la méditation de la
Bible. Il rédigea le "Commentaire sur l'évangile
de saint Matthieu" (353-356) et accueilli vers 356 le futur saint
Martin.
Celui-ci s'attacha à l'évêque Hilaire comme "un
converti d'Egypte auprès d'un "ancien" du delta ou
du désert" et reçut de lui une formation ascétique.
Mais rapidement l'Eglise se trouva en pleine crise dont la cause était
l'hérésie arienne (355). Cette hérésie qui
nie la consubstantialité du Père avec le Fils au sein
de la Trinité fut combattue par une majorité d'évêques
occidentaux mais aussi par d'autres d'Orient, comme Basile, Athanase
d'Alexandrie, Grégoire de Nysse, Grégoire de Naziance.
Devant la volonté de l'évêque d'Arles Saturnin,
qui voulait imposer l'Arianisme à toute l'Eglise de Gaule, Hilaire
entra en lisse et organisa la résistance. Dès ce moment
et à l'instar de saint Athanase dAlexandrie, on le surnommera
l'Athanase d'Occident. Ce qui lui valut en 356, au concile de Béziers
d'être condamné pour sa Foi Orthodoxe et persistant dans
son attitude antiarienne, il fut déposé, puis exilé
en Phrygie (centre de la Turquie). Banni, il s'écria : "On
peut bien exiler les évêques, mais peut-on exiler la vérité?".
L'EXIL
Du fond de la Phrygie, le grand exilé écrivit inlassablement,
car dit-il "on ne peut retenir captive la parole de Dieu".
En douze livres, il établit son traité "sur la Trinité".
Au coeur de la trame du traité saint Hilaire nous fait découvrir
le "mystère du Christ vrai Dieu et vrai homme". Il
présente et réfute avec vigueur les thèses de l'hérésie
arienne sur la nature créée du Fils et démontre
à partir de l'Ecriture son unité d'essence, de gloire
et d'action avec le Père. Pour les évêques de Gaules,
il écrivit aussi un traité "sur les synodes",
recueil de multiples formules de foi solennelle du Concile de Nicée2.
Pendant son exil, il étudia les Pères grecs et surtout
Origène et servira de pont entre les deux moitiés de l'Eglise
universelle. C'est aussi suite à la réaction anti-arienne
menée par Basile, qu'Hilaire tentera d'unir l'Occident et l'Orient
chrétien dans la Foi Nicéenne. Son exil en Phrygie aura
eu un effet salutaire sur sa propre formation et sur l'information de
l'épiscopat occidental quant au véritable enjeu de la
crise aérienne : le salut de l'homme en sa plénitude3.
LE RETOUR EN GAULE.
Vers la fin de l'année 360 il revient en Gaule, car les Ariens
en Orient redoutaient son influence grandissante. On le surnomma d'ailleurs
"le perturbateur de l'Orient"4. Sa présence, au concile
de Séleucie (359) où il avait demandé une séance
publique pour confondre les évêques hérétiques,
avait été pour eux un coup terrible. Après son
passage à Constantinople (360) passant par Rome, Hilaire rentra
en Gaule. Son retour à Poitiers fut un triomphe. Il y retrouva
son siège épiscopal grâce à l'empereur Julien.
Par ses talents d'homme d'action et d'écrivain, par la situation
politique du moment il put travailler à y restaurer l'Orthodoxie
en éliminant l'hérésie arienne de l'Eglise. Il
obtint l'excommunication (Synode de Paris -361) de deux leaders de l'arianisme
en Gaule, les évêques d'Arles et de Périgueux et
il s'appliquera avec fermeté mais aussi avec la douceur qui le
caractérise, à regagner les évêques qui avaient
faillis5 mais qui reconnaissaient leurs erreurs. Ce fut le salut de
la Gaule chrétienne. "Tout le monde reconnut, écrit
Sulpice Sévère, que notre Gaule fut débarrassée
de l'hé résie criminelle par le zèle d'Hilaire
de Poitiers."
Plusieurs miracles enthousiasmèrent
le peuple ainsi que sa grande charité. Il retrouva aussi Martin
qui initié à la vie monastique, s'établira dans
un ermitage à Ligugé (Premier monastère de la Gaule).
De nombreux disciples viendront rejoindre Martin. Plus tard celui-ci
deviendra lui-même Evêque de Tours et sera pour l'histoire
l'un des premiers représentants de la vie monastique en Gaule.
Mais saint Hilaire continua à souffrir des ravages fait par l'hérésie
arienne, il rassembla des conciles, et ira jusqu'à Milan pour
la combattre. Epuisé, il revient à Poitiers, rédigea
son "contre Auxence" où il dénonça avec
force les empiétements du pouvoir impérial sur les affaires
religieuses et où il précisa les conditions réelles
de l'unité des chrétiens : il aimait dire : "Les
oreilles du peuple chrétien sont plus saintes que le coeur de
leurs évêques".
Les dernières années de St Hilaire furent empreintes d'une
tranquillité qui n'était pas le reflet de son caractère,
ni de la paix de l'Eglise. Il préféra se consacrer à
l'enseignement de ses fidèles et rédigea alors le "commentaire
sur les psaumes", le "Traité des mystères"
et de nombreux "Hymnes" pour la vie liturgique. Aux clercs
de son Presbyterium, il dispensait une "théologie biblique"
qui était avant tout un commentaire suivi de l'Ecriture; se voulant
fidèle à une exégèse ecclésiale et
à une lectio ancrée dans les réalités du
magistère épiscopal afin que la Parole soit reçue
dans toute sa réalité et sa profondeur. Si l'oeuvre de
St Hilaire, n'eut qu'une influence restreinte en Orient, ses écrits
permirent à faire connaître en Occident quelques aspects
de la théologie grecque auxquels se référait encore
au 12ème siècle un de ses successeurs sur le siège
de l'Eglise de Poitiers, Gilbert de La Porée.
Hilaire, ce grand "confesseur" dont parle saint Jérôme
mourut à Poitiers dans la tranquillité soit le 1er novembre
367 ou le 13 janvier 368. La date précise de sa mort n'est pas
connue. Rapidement au nom de "confesseur" furent associés
celui de "théologien et de saint". Oui, Dieu avait
planté en dehors du monde mais dans Son Eglise un homme juste
comparable à la beauté d'un cèdre et dont le psalmiste
dit : "Le juste pousse comme un palmier et il grandit comme un
cèdre du Liban".
VÉNÉRATIONS DES RELIQUES ET DU TOMBEAU
Aujourd'hui qui veut vénérer sur les lieux les reliques
de st Hilaire, doit se rendre à l'église "St Hilaire-le-Grand"
à Poitiers. Eglise construite sur l'en: placement du tombeau
du saint Evêque de Poitier-D'après la tradition, c'est
Hilaire lui-même qui aura érigé, dans une nécropole
gallo-romaine, l'oratoire où il fut inhumé : un oratoire
dédié aux martyrs romains de 363, saint Jean et saint
Paul. Ceux-ci ayant refusé; d'offrir de l'encens à la
statue de Jupiter furent décapités sur l'ordre de Julien
l'Apostat.
Le tombeau de saint Hilaire fut une halte recommandée aux pèlerins
de saint Jacques de Compostelle (12èmeS.).
Aujourd'hui l'église "Saint-Hilaire-le-Grand" collégial
historique est sous le patronage de l'Unesco.
Marie Louise Wiewanters de Guillen
publié dans Foi transmise et sainte tradition, revue de la Fraternité
Saint Jean Cassien
TEXTES :
Catéchèse de la foi baptismale.
« Le Christ ordonne à ses Apôtres de baptiser "au
nom du Père, du Fils et Saint Esprit", c'est-à-dire
en reconnaissant l'Auteur, le Fils Unique et le Don. L'auteur de tout
est unique car "il n'y a qu'un seul Dieu, le Père de qui
tout vient", et "Un seul" Fils Unique, Jésus-Christ
notre "Seigneur par qui tout existe" (lCor8, 6) et "Un
seul Esprit" (Ep4, 4), Don répandu en tous. Tout est donc
ordonné selon les puissances et les qualités des personnes
divines : un seul Etre Tout-Puissant de qui tout vient, un seul Engendré
par qui tout est, un seul Don, source de l'espérance parfaite.
Rien ne manque à une telle perfection qui embrasse dans le Père,
le Fils et le Saint Esprit, l'immensité dans l'Eternel, la vue
de Dieu dans l'Image, sa jouissance dans le don.» LA TRINITE 2/1
Dieu est partout.
« Le ciel tout entier tient dans la paume de Dieu et la terre
tout entière est enclose dans son poing. Or la parole de Dieu
fait bien sûr toujours profit à l'intelligence d'un esprit
religieux; cependant elle contient encore plus de sens lorsqu'on l'examine
au-dedans par la pensée qu'au moment où on la reçoit
au-dehors par l'ouïe. De fait le ciel enclos dans la paume de Dieu
est en même temps son trône et la même terre qui tient
dans son poing est l'escabeau de ses pieds. Cela en permet pas de concevoir,
sur le trône et l'escabeau, une apparence corporelle s'étalant
dans l'attitude de quelqu'un d'assis, puisque ce qui est pour elle trône
et escabeau, cette infinité puissante le prend dans sa paume
et l'enclôt en son poing. Mais grâce à cela, on saurait
que Dieu, au-dedans et au-dehors, est toujours présent à
l'origine des créatures, qu'il est à la fois transcendant
et immanent, c'est-à-dire répandu autour de toutes choses
et en elles. Tenir dans la paume et le poing manifesterait donc l'être
puissant sur la nature extérieure; le trône et l'escabeau
montreraient les êtres extérieurs à lui subordonnés
comme à l'être intérieur. Ces êtres extérieurs
à lui, au-dedans desquels il réside, voici qu'à
l'inverse, extérieur à eux, ce même Etre les enclôt,
intérieurs à lui. C'est ainsi qu'il tient tout entier
toutes choses et du dedans et du dehors : infini qu'il est, il n'est
rien dont il soit absent et rien non plus qui ne soit en lui, qui est
infini. Or donc cette conception très religieuse de Dieu faisait
les délices de mon âme, possédée qu'elle
était par l'amour du vrai. En effet, pensai-je, il n'est rien
qui soit digne de qui cherche à l'atteindre. Cela, nous le comprenions
avec respect; mais le prophète venait de rendre plus assuré
et manifeste encore en disant : "Où irais-je loin de ton
esprit, ou bien où fuirais-je loin de ta face? Si je monte dans
le ciel, tu y es; si je descends dans les enfers, tu es là aussi.
Si je prends mes ailes avant l'aurore et m'en vais habiter au fin bout
de la mer, là ta main me conduira et ta droite me tiendra."
(Ps. 138, 7 - 10) Aucun lieu n'est privé de Dieu; il n'en est
aucun qui ne soit en lui. Il est aux deux, il est dans les enfers, il
est par-delà les mers. Au-dedans il habite, il déborde
par dehors. Ainsi tout en possédant, il est aussi possédé
; il n'est enfermé dans rien, mais il n'est rien où il
ne soit" LA TRINITE, 1,6.
Louanges et profession de Foi.
« Quant à moi, j'en ai conscience : le devoir principal
de ma vie est de m'offrir à Toi, Dieu, Père Tout-Puissant,
pour que tout en moi, paroles et pensées, parlent de Toi. Oui,
la plus grande récompense que puisse m'apporter l'usage de la
parole dont tu m'as gratifié, c'est de l'employer à te
servir, en proclamant ce que Tu es, c'est-à-dire le Père
de Dieu, Unique-Engendré, et en le démontrant à
un monde qu'il ignore et à l'hérétique qui le nie.
Oui, vraiment, c'est là, je le déclare, mon seul désir
! Toutefois j'ai grand besoin d'implorer dans la prière la grâce
de ton secours et de la miséricorde, pour que le souffle de ton
Esprit gonfle les voiles de notre foi, tendues pour Toi; qu'il nous
fasse avancer dans ce voyage qu'est l'enseignement que nous commençons
de donner ici (...) Accorde-nous donc de donner aux mots leur véritable
sens, prodigue la lumière à notre esprit, la beauté
de l'expression à notre style et établis note foi dans
la vérité. Accorde-nous de dire ce que nous croyons ;
selon le devoir qui nous incombe, après avoir appris des prophètes
et des apôtres que Tu es un seul Dieu et qu'il y a un seul Seigneur
Jésus-Christ, donne-nous de Te célébrer, à
rencontre des négations hérétiques, donne-nous
de le proclamer, Lui, Dieu et non faux Dieu» LA TRINITÉ,
l, 6.
Le mystère Trinitaire et l'union Eucharistique.
« Eucharistie nourriture céleste et lien d'unité
de la communauté chrétienne avec le Christ, Nier l'unité
naturelle du Père et du Fils c'est nier la réalité
de la communion eucharistique au Christ. La communion Eucharistique
pour saint Hilaire débouche dans le mystère de l'intimité
trinitaire à laquelle l'Eucharistie nous fait participer, dont
elle nous révèle la vérité et dont elle
permet la confession. "Si donc le Christ a vraiment assumé
la chair de notre corps, si cet homme, né de Marie, est vraiment
le Christ, nous mangeons la chair de son corps dans le sacrement, et
par-là, nous sommes un, puisque le Père est en lui et
que lui est en nous", LA TRINITE 8/16 6
TROPAIRE DE ST HILAIRE - ton 4
Saint Père et Hiérarque Hilaire, la vérité
de tes œuvres t'a révélé à ton troupeau,
modèle de foi, image de douceur et maître de tempérance;
C'est pourquoi par ton humilité, tu as été élevé,
par ta pauvreté tu es devenu riche, prie le Christ Dieu de sauver
nos âmes.
KONDAKION DE ST HILAIRE - ton 3
Excellent docteur de la foi, lumière de la Sainte Eglise du Christ,
comme Lui tu donnes ta vie pour tes brebis, saint évêque
Hilaire, intercède pour nous auprès du Dieu unique en
trois personnes pour qu'il garde Son Eglise dans la paix.
1 J. Doigne
1 bis. témoignage de Venance Fortunat
2 Lire les Pères de l'Eglise / sœur Gabriel Peters O.S.B
3 Le mystère de la Trinité / père Boris Bobrinskoy
4 Sulpice Sévère
5 Lire les Pères de l'Eglise / soeur Gabriel Peters O.S.B
6 Sources générales : Document du site diocésain
de Poitiers, abbaye saint Benoît, ch, éditions du Cerf,
site saint Patrick, documents de la collégiale "St Hilaire
le Grand", Les Pères de l'Eglise - collection Migne, L'Eglise
de Poitiers - Beauchesne - 1988.